Gastem et un RPEP pro-pétrole
Le gouvernement du Québec a pourri une situation en imposant un RPEP dont les distances séparatrices sont incompatibles avec le principe de précaution. Des municipalités ont donc choisi de combler cette lacune et Ristigouche Sud-Est doit se défendre contre l'attaque pétrolière.
Gastem et un RPEP pro-pétrole
Depuis le 28 décembre 2011, date à laquelle la première mouture du RPEP (Règlement pour la protection de l'eau potable) a été déposée par le ministre de l'Environnement de l'époque, M. Pierre Arcand, deux visions de la protection de l'eau s’affrontent. D'un côté, les 3 versions successives du RPEP des gouvernements Charest, Marois, et Couillard posent comme prémices que seuls les agriculteurs et les municipalités peuvent polluer les sources d'eau potable; toutes ont un point en commun : elles n'exigent pas une distance séparatrice suffisante entre une source d'eau potable et un forage avec fracturation hydraulique, ce qui revient à donner carte blanche aux utilisateurs de cette technique controversée. De l'autre côté, le monde municipal tente de remplir du mieux qu’il le peut son mandat de protection des sources d'eau des citoyens en exigeant des distances séparatrices minimales entre les sources d'eau destinée à la consommation humaine ou animale et les puits de pétrole.Malgré un manque flagrant de ressources, de nombreuses municipalités souhaitent donc imposer des normes plus réalistes que celles adoptées le gouvernement provincial. Symbole de l'affrontement entre un gouvernement à la solde du lobby pétrolier et le monde municipal qui veut protéger le bien commun, la petite municipalité de Ristigouche-sud-est « ... fait face à une poursuite de 1,5 million de dollars intentée par la compagnie Gastem, qui lui reproche d'avoir adopté un règlement pour protéger ses sources d'eau potable. Selon la société d'exploration et d'exploitation gazière et pétrolière, ce règlement a compromis la réalisation de travaux de forage prévus sur le territoire... »1
Le maire de Ristigouche-Sud-Est, M. François Boulay, déplore que sa municipalité soit poursuivie par la gazière Gastem pour la somme de 1,5 million.2 En effet, avec ses 168 contribuables, la municipalité n'a pas les moyens de se défendre contre la gazière et a dû faire une levée de fonds pour se défendre devant les tribunaux.3 De nombreux citoyens et municipalités, dont celle de Matane, ont répondu à l’appel et soutiennent cette petite municipalité qui a assez de colonne vertébrale pour oser protéger ses citoyens.4
Comme la troisième version du RPEP du gouvernement du Québec, adoptée en 2014, ne souscrit pas au principe de précaution en imposant des distances séparatrices insuffisantes par rapport aux sources d'eau, de nombreuses municipalités ont adopté un règlement pour accroître ces distances. À la fin juin, quelques 289 municipalités avaient adopté un tel règlement ou s'apprêtaient à le faire; ce nombre tient compte de grandes villes qui ont appuyé formellement cette démarche, telle que Montréal. En tout, ces municipalités représentent 3 727 972 citoyens et citoyennes.
Le principe de précaution ne saurait plaire au PDG de Gastem, M. Raymond Savoie, un ancien ministre délégué aux mines dans le cabinet de M. Bourassa. Écraser un petite municipalité comme Ristigouche, c'est bon pour ses affaires, et tant pis si des personnes doivent boire une eau contaminée! Si le gouvernement du Québec avait fait sa « job » correctement, aucune de ces municipalités n'auraient eu besoin de se débattre comme des diables dans l'eau bénite pour protéger l'eau, un bien commun qu'on n'a pas le droit de mettre en péril.
En prime, un RPEP qui exigerait une distance de 1000 m sous une nappe phréatique aurait rendu la fracturation impossible sur les trois quarts de l'île d'Anticosti. Encore une fois si le gouvernement avait fait sa job correctement avec le RPEP, il pourrait honnêtement dire qu'il ne veut pas détériorer la « perle du Saint-Laurent ». Donc, pour mettre fin à l'entente légale avec les sociétés pétrolières, le gouvernement (lire les payeurs de taxes) n'aurait pas à payer des dédommagements faramineux de centaines de millions de dollars. Un bon RPEP, ça réduit les risques à la santé des citoyens et ça peut sauver des millions au trésor provincial.
Pour toutes ces raisons, il faut appuyer la démarche de Ristigouche!5
Gérard Montpetit
La Présentation,
le 21 juillet 2017
2 http://feedproxy.google.com/~r/fluxdudevoir/~3/DdXRhjX4uFo/ristigouche-manque-de-fonds-pour-se-defendre-contre-gastem
3 http://www.ledevoir.com/environnement/actualites-sur-l-environnement/411205/une-petroliere-poursuit-un-village-de-gaspesie?utm_source=infolettre-2014-06-17&utm_medium=email&utm_campaign=infolettre-quotidienne