Le monstre pétrole
Mme Louise Morand commente la réaction de mépris qu’a subi le Québec suite à l'annonce de l’opposition de la communauté métropolitaine de Montréal au projet Énergie Est.Le monstre pétroleLa réaction au refus de la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM) du projet de pipeline Énergie Est était prévisible. On n’écorche pas l’industrie la plus puissante de la planète sans s’attendre à recevoir quelques morsures et rugissements en provenance de la bête. Il va de soi que c’est de l’industrie pétrolière dont il est ici question. La compagnie TransCanada et son projet de pipeline Énergie Est ne sont qu’une carte dans la main des grandes entreprises pétrolières présentes dans les sables bitumineux, dont Exxon, British Petroleum, Shell, Total, Chevron et Statoil. Sans oublier Suncor qui vient d'être grassement subventionnée par le gouvernement Couillard.Depuis plus de 40 ans, les géants du pétrole et du gaz transportent leur panier à pique-nique en Alberta et en Saskatchewan pour faire bonne chère. Ils sont américains, anglais, hollandais, français, norvégiens ou chinois de souche. Mais leur famille s’est considérablement élargie au fil du temps par des alliances souvent incestueuses et le pouvoir entremetteur d’Internet. On peut sans exagérer affirmer que des membres de presque toutes les nations unies sont aujourd’hui réunis autour de la grande table de la forêt boréale canadienne, faisant raser tout ce qui pousse et injecter le sous-sol de liquides empoisonnés, tout en rêvant pour eux-mêmes de nature vierge et propre à habiter.Avec le rejet du projet Énergie Est par la CMM, une pluie de crachats est tombée sur le Québec. On a dit que nous étions mauvais Canadiens, usurpateurs de la rente pétrolière, ingrats1. On a cherché à discréditer le processus d’examen et de consultation des 82 municipalités de la CMM en le réduisant à la personnalité du maire de Montréal. On a répété que «les faits» et «la science» démontrent que l’industrie des sables bitumineux et la compagnie TransCanada font des miracles. On nous a accusés d’être incapables de voir à long terme, pas plus loin que le bout de notre volonté d’un avenir viable pour nos enfants2.Il ne fait aucun doute que nous n’en sommes encore qu’aux premières hostilités de la part de ceux et celles qui voient leur rente pétrolière menacée. Déjà une pétition s’organise pour exiger du gouvernement canadien que le Québec soit privé des transferts de la péréquation3. Il y aura encore une vague déferlante de propagande dans tous les médias pour faire croire à la population que le développement du pétrole des sables bitumineux peut se faire de façon propre et sécuritaire, que cette ressource nous apportera la richesse et qu’elle est un moyen pour effectuer la transition énergétique. Même si la bataille contre Énergie Est et pour la transition énergétique et le contrôle du climat est loin d’être terminée, quelque chose est encourageant dans la réaction des alliés politiques des pétrolières au rapport de la CMM. C’est que la bête a été piquée. Elle sort de son mépris hautain et commence à s’agiter. Les sages paroles de Gandhi résonnent comme un baume face à ces gesticulations de riches sociopathes: «D’abord ils vous ignorent, ensuite ils vous raillent, ensuite ils vous combattent et enfin, vous gagnez»4. Pour que cette phrase reste vraie pour nous, il faudra toutefois travailler sans relâche, bander nos muscles et continuer de tirer ensemble dans la bonne direction.Louise MorandComité vigilance hydrocarbures de L’AssomptionLe 30 janvier 2016
1 Manon Cornellier. «Un peu de respect, svp!». Le Devoir. 27-01-2016. http://www.ledevoir.com/politique/canada/461308/un-peu-de-respect-svp
2 Presse canadienne. «L’Ouest fustige les maires qui s’opposent à Énergie Est». Le Devoir. 23-01-2016. http://m.ledevoir.com/#article-460978