LETTRE DU CVH DE LA MRC DE LOTBINIÈRE AU PREMIER MINISTRE DU QUÉBEC - Demande de rencontre sur l’interdiction de la fracturation et des autres procédés non conventionnels d’extraction d’hydrocarbures au Québec dans le contexte des intentions annoncées de Questerre Energy Corporation

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LETTRE DU CVH DE LA MRC DE LOTBINIÈRE AU DÉPUTÉ LAURENT LESSARD – Demande de rencontre sur le projet de gaz de schiste de Questerre dans Lotbinière

Le 14 février 2017 Monsieur Philippe Couillard, Premier Ministre du QuébecÉdifice Honoré-Mercier, 3e étage835, boul. René-Lévesque EstQuébec (Québec) G1A AB4 Objet : Demande de rencontre sur l’interdiction de la fracturation et des autres procédés non conventionnels d’extraction d’hydrocarbures au Québec dans le contexte des intentions annoncées de Questerre Energy Corporation  Monsieur le Premier Ministre, Dans son communiqué du 8 février dernier[1], la compagnie Questerre Energy Corporation a indiqué qu’elle évalue à 70 % la probabilité de « développer » commercialement une portion des permis qu’elle détient dans les MRC de Lotbinière et de Bécancour, afin d’extraire le gaz de schiste en utilisant la fracturation hydraulique et des forages horizontaux de 2 400 mètres. Ainsi, apparemment, la direction de Questerre  accorde plus de crédibilité à la Loi sur les hydrocarbures que vous avez fait adopter sous le bâillon dans la nuit du 9 au 10 décembre 2016 qu’à vos propos  du 30 septembre, quand vous affirmiez aux maires de la Fédération québécoise des municipalités qu'il n'y aurait pas de fracturation dans la vallée du St-Laurent.  Les investisseurs semblent voir les choses du même œil : propulsé par votre loi bâillon, le titre de Questerre a plus que doublé entre le 7 et le 12 décembre 2016[2] – alors que cette compagnie avait radié 75 % de ses actifs au Québec en mars 2016[3]Devant cette situation troublante, nous vous demandons de faire cesser l’ambiguïté en interdisant la fracturation et les autres procédés non conventionnels d’extraction d’hydrocarbures au Québec, et nous sollicitons l’honneur de vous rencontrer afin d’en discuter. L’extraction de gaz de schiste par fracturation est un enjeu énorme pour nous, en tant que citoyennes et citoyens de la MRC de Lotbinière –  une région qui est d’ailleurs aux prises avec une situation… de plein emploi[4]. Tout d’abord, vous n’ignorez pas les risques que la fracturation fait peser sur l’eau potable et la santé, d’autant plus que le Règlement sur le prélèvement des eaux et leur protection (RPEP) que votre gouvernement a adopté en août 2014 empêche les municipalités d’imposer des distances séparatrices raisonnables entre les puits de forage et les sources d’eau potable. Une importante étude de l’Environmental Protection Agency des États-Unis (EPA), dont le rapport final[5] a été rendu public le 13 décembre dernier, prouve que la fracturation hydraulique a contribué à la contamination d’eau potable à toutes les étapes du procédé : puisements d’eau pour la fracturation, mélange de l’eau avec des composés chimiques pour préparer les liquides de fracturation, injection des liquides dans le sous-sol, collecte des eaux de reflux qui s’écoulent des puits de fracturation après les injections et stockage des eaux de reflux. Cette synthèse des recherches existantes sur le sujet confirme aussi que chaque puits foré exige d’immenses quantités d’eau et que la fracturation peut ainsi engendrer des pénuries ou limiter les quantités d’eau disponibles pour d’autres usages, notamment l’agriculture. Une autre étude récente a mis en lumière la corrélation entre le développement de la filière du gaz non conventionnel en Pennsylvanie et des symptômes de migraine, de troubles des sinus et de fatigue. L’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) a diffusé en mars 2016 son étude[6] sur les impacts psychologiques et sociaux des projets d’hydrocarbures. Corroborant tout à fait nos observations sur le terrain, cette recension de recherches fait ressortir les perturbations profondes associées à l’annonce de ce type de projets, sur les individus et les collectivités, et qui incluent notamment : stress et anxiété, sentiment de perte de confiance, perte de contrôle, détresse. Le lien démontré entre la fracturation et une hausse spectaculaire de l’activité sismique ne fait plus aucun doute non plus et de nouvelles études en ce sens sont régulièrement publiées[7]. Tout en constatant une corrélation irréfutable entre la fracturation et les tremblements de terre, les chercheurs qui ont réalisé ces études admettent qu’ils ne savent pas vraiment ce qui se passe sous la terre, ni pourquoi certaines opérations de fracturation déclenchent un séisme. Vous comprendrez que l’idée de mettre notre région à la disposition d’apprentis sorciers qui risquent d’y causer les pires dommages est révoltante pour nous. Finalement, nous sommes de plus en plus préoccupés par le risque de perte de valeur de nos propriétés. Des agents d’immeubles nous ont signalé que les rumeurs d’implantation de l’industrie du gaz de schiste inquiètent les acheteurs éventuels et ont déjà commencé à les faire fuir. Monsieur le Premier Ministre, vous qui avez le devoir de veiller au bien commun, laisserez-vous appauvrir les gens de Lotbinière pour enrichir les actionnaires d’une compagnie albertaine comme Questerre Energy Corporation et de sa partenaire, la multinationale espagnole Repsol? Nous vous serions sincèrement reconnaissants de ne pas nous répondre que la compagnie n’a pas encore sollicité de certificats d’autorisation, qu’il s’agirait de projets pilotes réalisés dans des zones peu peuplées ni que tout projet serait régi par les plus hauts standards. En effet : 

  • Nous savons que la compagnie n’a pas sollicité de certificats d’autorisation et nous ne voyons pas la pertinence d’attendre ce moment pour tuer dans l’œuf ces projets qui ne doivent jamais voir le jour.

 

  • Nous savons aussi que les risques liés à la fracturation sont au moins aussi élevés en phase de projet pilote qu’en phase de production, et que des projets pilotes ne seraient réalisés que dans l’espoir de résultats concluants menant à une production à grande échelle. (Votre ministère de l’Énergie et des Ressources naturelles n’a-t-il pas fait évaluer les besoins de main d’œuvre liés au gaz de schiste sur la base d’une hypothèse de 3 600 puits forés dans les Basses-Terres du Saint-Laurent?[8])

 

  • Nous n’admettons pas l’idée que la contamination des eaux souterraines serait plus acceptable dans les aires peu peuplées que dans les zones populeuses, ni que nous ne devrions pas, comme société, tout faire pour laisser toute l’eau pure possible aux générations qui suivent.

 

  • Finalement, en tout respect, nous ne voyons pas en quoi des standards « élevés » rendraient acceptables des interventions inacceptables comme l’injection de produits toxiques dans notre sous-sol, la fracturation de la roche porteuse de risques sismiques, les nuisances associées à cette industrie envahissante, la dégradation de notre milieu de vie ou le saccage de notre région agrotouristique pour un boum qui durerait tout au plus quelques années et la laisserait ensuite dévastée.

 En conclusion, Monsieur le Premier Ministre, permettez-nous de vous exprimer notre immense déception devant le manque d’écoute de votre gouvernement dans ce dossier, jusqu’ici.  L’opposition au développement de la filière des hydrocarbures est massive, largement majoritaire, réfléchie; elle ne s’est jamais démentie et s’est au contraire amplifiée au fil des consultations qui se sont succédé. L’acceptabilité sociale n’est tout simplement pas au rendez-vous, monsieur Couillard.  Ni vous, ni votre ministre de l’Énergie et des Ressources naturelles, ni les compagnies ne pouvez vous draper dans ce concept pour tenter de justifier des décisions auxquelles la population n’a pas consenti.  Soyons clairs : la population dit « Non ». De plus, les Québécois décèlent parfaitement la profonde incohérence qui existe entre les professions de foi de votre gouvernement pour la transition énergétique et la lutte aux changements climatiques, d’une part, et d’autre part l’appui que vous donnez au développement des hydrocarbures, notamment le gaz naturel fossile, grand émetteur de méthane et contributeur au réchauffement climatique. Il est encore temps de corriger le tir en interdisant aux pétrolières et aux gazières de devenir les nouveaux maîtres chez nous. Cette interdiction devrait s’appliquer à tout le Québec car ce qui est mauvais pour la vallée du Saint-Laurent est tout aussi mauvais pour le Bas-Saint-Laurent, la Gaspésie et Anticosti. C’est une question d’équité. Rappelez-vous que ces compagnies ont acquis pour une bouchée de pain les « claims » sur lesquelles elles fondent leurs prétentions et qu’il est en votre pouvoir de les stopper.  Par contre, chaque geste que vous posez en leur faveur renforce leur pouvoir de négociation ainsi que leur détermination.  Tournons cette page et lançons notre économie dans une direction favorable au Québec et aux Québécois, nous vous en prions. Dans l’espoir que vous accepterez de nous rencontrer pour discuter de ce dossier, Monsieur le Premier Ministre, nous vous présentons nos salutations respectueuses. Au nom du Comité vigilance hydrocarbures de la MRC de Lotbinière, 

Gilberte Lambert, Saint-FlavienPierre Bluteau, LeclercvilleMarcel Cayer, Saint-ApollinaireIrène Dupuis, Saint-Antoine-de-Tilly Marc-André Fortier, Sainte-Agathe-de-LotbinièreJean Pelletier, LotbinièreGesa Wehmeyer, Sainte-CroixLucien Bergeron, Saint-Agapit

 Courriel : cvhMRClotbiniere@rvhq.cac.c. M. Laurent Lessard, député de Lotbinière-Frontenac[1] Communiqué – Questerre Updates Quebec Resource Assessment[2] Les Affaires, 12 décembre 2016.[3] TVA Nouvelles, 10 mars 2016[4] Le Peuple Lotbinière, La main-d’œuvre est encore rare[5] U.S. EPA. Hydraulic Fracturing for Oil and Gas: Impacts from the Hydraulic Fracturing Water Cycle on Drinking Water Resources in the United States (Final Report). U.S. Environmental Protection Agency, Washington, DC, EPA/600/R-16/236F, 2016[6] Institut national de santé publique du Québec[7] Un petit échantillon parmi une foison d’articles : University of Alberta, Study shows earthquakes in Western Canada caused by hydraulic fracturing are becoming larger and more frequent, Science, Fault activation by hydraulic fracturing in western Canada, Globe and Mail, Study confirms link between fracking, earthquakes in Western Canada, Seismological Research Letters, Fracking Linked to Most Induced Earthquakes in Western Canada, Washington Post, 7 million Americans at risk of man-made earthquakes, USGS says[8] KPMG, Besoins de main d’oeuvre liés au développement d’une industrie d’exploitation des hydrocarbures au Québec

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