Non, nous n’aimons pas les pipelines : réponse au professeur Pineau

Mme Denise Campillo et M. François Prévost, de Roxton Falls, répondent au professeur Pineau qui se porte malgré lui à la défense des pipelines.

Non, nous n’aimons pas les pipelines : réponse au professeur Pineau

Le professeur Pierre-Olivier Pineau, expert reconnu dans le domaine de l’électricité et de l’énergie en général, est un fin observateur de la situation énergétique au Canada. Dans une chronique de La Presse+i, il présente les pipelines comme un mal nécessaire, une réalité incontournable. En bon intellectuel pondéré, M. Pineau s’efforce d’analyser la question des pipelines et des hydrocarbures de façon « objective » et non partisane. Il est toujours mesuré dans ses prises de position, vertu qu’il faut lui reconnaitre. Mais le serait-il trop? Au point de rater la cible? Or la cible est là, balisée par l’Accord de Paris, définie par nos gouvernements : il faut réduire les gaz à effet de serre de 30 % d’ici 2030. Dans ce contexte de crise climatique, si l’on se pose comme rationnel, raisonnable, capable de prendre un peu de distance, peut-on simplement s’appuyer sur un argument économique à court terme et déclarer : « Les entreprises veulent construire, agrandir ou remettre en état des pipelines au Canada parce qu’elles ont des clients qui sont intéressés à y transporter des produits »? Répondre à la demande du marché, est-ce la seule finalité d’une activité économique?Permettre à l’industrie canadienne des hydrocarbures d’améliorer son efficacité, est-ce un objectif prépondérant? S’il est souhaitable d’aider l’Alberta à améliorer sa situation, ne vaudrait-il pas mieux contribuer à réduire l’exploitation des sables bitumineux et développer le secteur de l’économie verte?Selon M. Pineau, « un pipeline ne crée pas des utilisateurs de pétrole, pas plus qu’il ne crée des producteurs ». Or l’aménagement d’un pipeline comme TransMountain ou Énergie Est vise avant tout à accroitre la production des sables bitumineux et à exporter ce pétrole vers les marchés asiatiques. On augmente l’offre, on favorise la hausse de la demande, tout cela pour des produits qui sont déjà en surproduction et dont on sait qu’ils devraient rester sous terre dans l’immédiat.M. Pineau va aussi faire appel à un argument écologique : les pipelines favoriseraient la sécurité du transport du pétrole. C’est ignorer grossièrement les centaines de déversements ou de fuites imputables à des oléoducs.M. Pineau n’aime pas les pipelines, mais considère que si nous ne pouvons pas nous en passer, c’est la faute aux consommateurs. « Aimons différemment dans nos choix de consommation et le marché du pétrole déclinera. » Le recours à cet argument social et moral est d’une hypocrisie sans nom. Au lieu de critiquer nos dirigeants politiques et économiques, qui favorisent une culture de consommation individuelle et notamment la perpétuation du règne de l’automobile, le professeur Pineau impute aux citoyens ordinaires la responsabilité des orientations toxiques du marché et de la société.M. Pineau, vous qui êtes un expert, nous aimerions vous entendre appeler à une véritable lutte contre les changements climatiques, et à une véritable transition énergétique basée sur l’efficacité et l’innovation.

Denise Campillo et François PrévostRoxton FallsLe 1er décembre 2016

Denise Campillo

Artiste-peintre de renom établie à Roxton-Falls, en Montérégie, Denise Campillo contribue de multiples façons à la lutte aux changements climatiques, notamment par son engagement à titre d’adhérente au RVHQ.

Née en Algérie en 1949, Denise Campillo a grandi et étudié en France, puis a immigré au Canada en 1974. Elle vit depuis 1980 au Québec, où elle a pris racine.

Issue d’un milieu modeste mais valorisant l’étude, les sciences et les arts, sa famille l’a poussée vers l’université où elle a obtenu des diplômes en langue et littérature anglaises, en enseignement, en traduction. Elle a enseigné à divers niveaux et fait carrière en traduction scientifique.

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