Des maires et mairesse pour une sortie du gaz naturel dans les bâtiments

Marc-André Guertin, Mélanie Villeneuve, Paul Germain, Philôme La France et Richard Belhumeur

Les auteurs sont respectivement maire ou mairesse de Mont-Saint-Hilaire, Otterburn Park, Prévost, Petit-Saguenay et Saint-Cuthbert.

Le Devoir, section IDÉES
Édition du 13 décembre 2022

Nous, maires et mairesse de municipalités du Québec, avons un message clair à envoyer au gouvernement du Québec et à l’ensemble des acteurs du bâtiment, publics ou privés : pour atteindre nos objectifs climatiques, il faut abandonner rapidement les énergies fossiles dans le cadre bâti québécois. En Amérique du Nord, de nombreuses municipalités réglementent afin de retirer les combustibles fossiles, et notamment le gaz naturel, des bâtiments. Nous comptons nous joindre au mouvement afin d’accélérer la transition énergétique.

Les municipalités du Québec comptent contribuer activement à la nécessaire transition énergétique, que ce soit dans le développement de nouvelles sources d’énergie propre ou par leur participation à la décarbonation d’activités émettrices de gaz à effet de serre. Les bâtiments résidentiels, commerciaux et institutionnels — au troisième rang des secteurs émettant le plus au Québec — sont un chantier prioritaire de décarbonation nécessitant une volonté politique forte de la part de l’ensemble des ordres de gouvernement.

À cet effet, nous tenons à souligner l’initiative de la Ville de Montréal qui a annoncé qu’elle exigera que tous les bâtiments neufs soient « zéro émission » d’ici 2025. Ce pas important, à la fois politique et réglementaire, ouvre la voie à d’autres initiatives en ce sens. Car chaque nouveau bâtiment raccordé au gaz naturel, chaque renouvellement d’un appareil de chauffage alimenté aux énergies fossiles, accentue notre verrouillage carbone, c’est-à-dire qu’il nous rend dépendants de systèmes énergétiques incompatibles avec les impératifs de réduction des gaz à effet de serre.

Plusieurs municipalités au Québec peuvent témoigner des pressions s’exerçant sur le marché immobilier. Des développements d’envergure, desquels nous attendons l’atteinte d’exigences ambitieuses en matière de développement durable, sont menacés par un raccordement aux énergies fossiles. En tant qu’élus, nous faisons face à des défis similaires lorsque vient le temps de décarboner nos bâtiments municipaux ou d’offrir de nouvelles infrastructures à nos concitoyens. Petites, moyennes ou grandes, les municipalités évoluent dans des réalités différentes, mais il est impératif de s’unir autour de cibles à la hauteur d’une véritable transition écologique.

Alors que le Québec vit une crise de l’habitation et que l’offre de logement devra augmenter rapidement au cours des prochaines années, il importe d’envoyer un signal clair aux constructeurs. Pour l’instant, le rythme des rénovations énergétiques ainsi que la performance environnementale du cadre bâti existant ou en voie de construction

Nous devons agir maintenant et fournir un cadre efficace afin de décarboner le secteur du bâtiment de la manière la plus coordonnée qui soit. Pour ce secteur comme ailleurs, il n’y aura pas de solutions miracles. Le rôle des décideurs publics sera crucial afin d’exiger des pratiques alignées avec nos ambitions climatiques tout en créant des conditions favorables facilitant l’adaptation des parties prenantes. Ces conditions passent par la formation et un plus grand accompagnement des acteurs du domaine, un appui financier à destination notamment des moins favorisés, ainsi qu’un meilleur accès à l’information concernant la performance énergétique des bâtiments. La disponibilité de données fiables est indispensable à la décarbonation du cadre bâti, mais également en ce qui a trait à des objectifs de sobriété énergétique par le respect de certains seuils de performance.

L’Union des municipalités du Québec considère déjà le secteur du bâtiment comme « une part importante de la consommation énergétique » et soutient les municipalités dans sa conversion énergétique vers des sources moins polluantes. La Fédération québécoise des municipalités a aussi joué un rôle actif dans d’importantes réalisations concernant la lutte contre les changements climatiques et la sortie des énergies fossiles. Aujourd’hui, la décarbonation des bâtiments représente un chantier incontournable de la transition énergétique au Québec, et cette transition ne se fera pas sans des balises claires vers l’abandon du gaz naturel.

Les municipalités peuvent agir pour faire évoluer le cadre réglementaire québécois. Un rapport sur le sujet a d’ailleurs été lancé récemment. Nous devons à la fois être exemplaires et jouer un rôle moteur dans la décarbonation des bâtiments résidentiels, commerciaux et institutionnels.

Au-delà des initiatives municipales, nous en appelons à la responsabilité du gouvernement du Québec face à l’urgence climatique. Tout comme pour l’abandon du mazout dans le cadre bâti, il a le pouvoir de réglementer la sortie du gaz naturel des bâtiments, et ce, à l’échelle du Québec. Nous demandons également au gouvernement d’être proactif et de soutenir publiquement et financièrement les municipalités engagées pour le climat qui prendront les moyens pour réduire et éliminer rapidement les émissions de gaz à effet de serre des bâtiments.

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