COP 28 : fourberies à Dubaï

M Gérard Montpetit, de La Présentation, dénonce la présence exagérée du lobby pétrolier au sein de la Conférence des Nations Unies sur le climat (COP 28) car ces « fourberies »   empêchent toute action efficace.

COP 28 : fourberies à Dubaï

« Que diable allait-il faire dans cette galère? ». C’est cette réplique de Molière qui me vient à l’esprit en voyant le spectacle burlesque où la Première ministre de l’Alberta, Mme Danielle Smith, avec une importante délégation financée par les contribuables albertains, va à la COP 28 pour défendre agressivement la production du sale pétrole de sa province. Il en va de même pour une délégation de la Saskatchewan. Je dois être naïf. Je croyais qu’une COP était une réunion annuelle où toutes les nations et tous les intervenants tentaient de trouver une solution à notre surconsommation d’énergies fossiles, responsable des changements climatiques.

Avouons que cette 28e conférence est très controversée. Tenir une conférence, dont l’objectif est de réduire la consommation de pétrole, dans les Émirats Arabes Unis (EAU), un des grands producteurs de pétrole, sous la présidence du Sultan Al Jaber, est un tour de force qui donne le tournis. En effet, M. le Sultan est également le président de l’ADNOC, la 12e plus grande compagnie pétrolière au monde. De plus, quelque 2 400 lobbyistes et représentants de l’industrie pétrolière sont présents dans les kiosques de cette conférence et tentent de minimiser tout projet qui oserait réduire l’utilisation du pétrole et du gaz. Peut-on s’étonner que l’ex-cheffe de l’ONU climat, Mme Christina Figueres, fustige ces représentants qui, minimalement, donnent l’impression d’être en conflit d’intérêts? De Dubai, notre ministre de l’environnement, M. Guilbeault, propose que le Canada réduise ses émissions de carbone. L’industrie pétrolière canadienne fait une crise de nerfs enfantine. De Dubai, Mme Smith qualifie M. Guilbault « d’extrémiste et de menace qui refuse de collaborer avec sa province. » Pour sa part, l’Association canadienne des producteurs pétroliers (ACPP) se plaint amèrement que cette annonce n’est pas une limite aux émissions de carbone, mais plutôt « une limite de facto à la production » de pétrole. Dans leur réaction épidermique à la mesure timide de M. Guilbeault, les richissimes producteurs pétroliers des sables bitumineux albertains négligent de dire que ces émissions sont calculées SEULEMENT sur la production en sol canadien et qu’en réalité les émissions de ce pétrole compteront dans le bilan du pays importateur lorsque celles-ci sortiront du tuyau d’échappement d’une voiture de ce pays! En d’autres mots, ces enfants-rois hurlent leur indignation si le Canada ose imposer la moindre restriction à leurs privilèges de générer des profits illimités et à leur « droit » de polluer la planète.

Comme les conférences précédentes, la COP 28 est censée rechercher un modus-operandi pour réduire notre surconsommation d’énergies fossiles, responsable des dérèglements climatiques que nous avons subis de plein fouet cette année. Malgré ce noble objectif, cette conférence est présidée par un promoteur pétrolier de grande envergure; à cela s’ajoutent près de 2 400 lobbyistes de l’industrie sans oublier les gouvernements provinciaux de l’Alberta et de la Saskatchewan qui surveillent étroitement leurs intérêts financiers et qui nient obstinément que leurs activités soient un prélude à la 6e grande extinction des espèces. Même s’il faut un consensus entre les pays, l’OPEC (Organisation des pays exportateurs de pétrole) s’oppose à l’idée de mettre progressivement fin à l’exploitation du pétrole. Même le Sultan Al Jaber fait l’objet d’allégations qu’il aurait profité de la COP pour conclure des ententes pétrolières.

Par rapport aux constats du GIEC, est-ce-ce que la diplomatie internationale pourrait faire des avancées dans la bonne direction? Il faudrait un miracle car cela ressemble à un théâtre dénaturé où tous les mauvais acteurs ont les premiers rôles. Avec toutes ces fourberies, cette COP 28 semble correspondre à la 2e définition du verbe prostituer : « avilir par intérêt »?

Gérard Montpetit

membre du CCCPEM (Comité des citoyens et citoyennes pour la protection de l’environnement maskoutain)

le 9 décembre 2023

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