Environnement et délinquance démocratique
Mme Josée Gagnon questionne la pertinence des décisions gouvernementales, tant provinciales que fédérales, prises depuis 2010 au sujet de l'environnement.
Environnement et délinquance démocratique
Le 30 aout 2010, le groupe de citoyens de Mont-Saint-Hilaire se joint à ceux de Saint-Marc-sur-Richelieu et nous allons à la rencontre de madame Nathalie Normandeau, au Mont-Saint-Bruno. L’air serein, installée dans un décor bucolique sur fond de verdure féérique, elle vient annoncer le début de la fracturation hydraulique, l’un des projets les plus polluants jamais autorisé dans la vallée du Saint-Laurent. Je suis bouche-bée mais à ce moment je crois encore que le gouvernement s’est engagé par erreur dans le développement des hydrocarbures, et je viens le lui faire savoir; naïve en effet; je déchante depuis, sans arrêt. La navrante démarche de relations publiques de madame Normandeau sera suivie d’une autre, tout aussi périlleuse, menée par l’Association pétrolière et gazière du Québec (APGQ), représentée par monsieur André Caillé. Les images verdoyantes, surplombées d’une jolie borne fontaine rouge, seront huées; quant à monsieur Lucien Bouchard, il échouera tout simplement avec le navire de l’association qu’il était venu représenter.
L’automne dernier, le gouvernement fédéral a délégué à Montréal l’Office national de l’énergie pour nous entretenir du pipeline proposé par la compagnie TransCanada. L’organe, auréolé d’un nuage d’opacité déconcertant et enduit de la sous-culture de l’industrie, a présenté ses membres à des citoyens manifestement bien informés; l’exercice a vraiment mal tourné. Toujours au fédéral, l’Accord économique et commercial global (AECG/CETA) que prépare, dans le secret, depuis plusieurs années, le Canada avec l’Union européenne, prévoit des mécanismes abusifs et inacceptables de poursuites contre tous les paliers de gouvernement, municipaux, provinciaux et fédéral. Le gouvernement signe un contrat qui permet à l’industrie pétrolière et gazière, entre autres, de poursuivre ses propres citoyens….Quelle aberration! Parallèlement, le Québec appuie l’accord, au lieu de lancer une volée de protestations contre ces mécanismes qui démantèlent les principes fondamentaux de la démocratie.
Au mois de juin dernier, le provincial est revenu à la charge pendant la période estivale, annonçant le projet de loi 106. Avec raison, le Front commun pour la transition énergétique relève la contradiction du projet : « un volet visant à diminuer la dépendance du Québec aux hydrocarbures et un autre volet visant l’exploitation des hydrocarbures ». À cette incohérence législative s’ajoute l’intensification de la capacité d’expropriation de l’État. De plus, cette loi sème la confusion dans le débat, en altérant le langage maintenant bien compris par la population du Québec : le terme gaz de schiste, par exemple, est remplacé par le terme gaz naturel, et pour parler de fracturation on utilise plutôt le mot stimulation; êtes-vous mêlé? Ajoutons que cette législation piétine au passage les principes de toutes les autres lois qui protègent nos milieux de vie comme les lois sur la qualité de l’environnement, celle du développement durable, la loi sur l’eau et celle sur la santé publique. Encore une fois incapable de nous convaincre du bien-fondé de sa démarche, le gouvernement l’a fait adopter sous le bâillon, dans la nuit du 9 au 10 décembre, au petit matin.
Il démontre ainsi l’affligeante capacité, pour un gouvernement démocratique, tout plein de ses pouvoirs, de légaliser des activités que la plupart d’entre nous considèrent déjà comme des crimes contre l’environnement.
Josée GagnonMont-Saint-HilaireLe 19 décembre 2016